A de nombreuses reprises, l' Eglise a proclamé bienheureux des groupes de fidèles, de religieux ou religieuses et de clercs qui perdirent leur vie à cause de la haine de leurs proches, de leurs compatriotes ou d' ennemis envers la Foi catholique, dans cette période sombre pour les Catholiques que fut l' entre-deux-guerres.
Plus d' un million de victimes marqua cette guerre sanglante de l' histoire européenne que fut la guerre civile espagnole ( 1936-1939 ). Les DEUX côtés eurent à déplorer des faits de guerre, mais aussi des crimes innombrables.
L' idéologie socialo-communiste, quant à elle, fit des milliers de victimes parmi les serviteurs de l' Eglise. Accuser l' Eglise de simple collusion n' est pas historiquement juste, si l' on considère les souffrances qu' elle endura.
Une véritable persécution contre les Chrétiens eut lieu dans les zones détenues par les rouges ou les anarchistes : des dizaines de milliers de laïcs, près de 4200 prêtres diocésains, 12 évêques, 283 religieuses, 2365 religieux...
Parmi eux, il y eut sept Augustins récollets, d' une branche des Augustins créée en 1588 à Tolède, et devenue autonome en 1911. Leur nom de " récollets " signifie qu' ils portaient une attention spéciale au recueillement.
Ils furent béatifiés le 7 mars 1999 par Jean-Paul II à Saint-Pierre-de-Rome.
Motril à la fin du XIXème siècle, la Place d' Espagne.
La passion des Pères augustins récollets eut lieu à Motril près de Grenade. Déjà dans les premiers jours de 1936, leur communauté connut l' angoisse du lendemain : il y eut insultes, menaces, perquisitions, etc...Ils refusèrent de quitter néanmoins leur ville pour rester au milieu de leurs ouailles qui subissaient, pour ceux qui fréquentaient leur église, les mêmes menaces.
A l' aube du 25 juillet 1936, cinq Augustins : les Pères Deogracias Palacios, Léon Inchausti, José Rada, Julian Benigno Moreno y Moreno et le Frère José Ricardo Diez furent enlevés violemment de leur couvent et emmenés à travers les rues, pour être finalement fusillés dans le dos, dans un jardin. Leurs corps furent laissés de nombreuses heures, gisant dans leur sang...
Le martyre du Père Vincent Pinilla et du curé Manuel Martin Sierra fut aussi dramatique. Quand les miliciens prirent d' assaut le couvent, les deux prêtres avaient trouvé refuge à l' hôpital, où ils avaient pu rester toute la journée. La nuit venue, ils partirent se cacher dans l' église paroissiale du Divin Pasteur. Au petit matin, Don Manuel Sierra célébra la messe à laquelle assistaient les Soeurs de l' hôpital et le Père Pinilla. Vers 10 heures et demie, les miliciens firent irruption dans l' église et fusillèrent les deux prêtres devant les passants, sur le seuil de l' église.
Le dernier à donner sa vie fut le Père Vincent Soler, qui avait trouvé refuge dans une famille amie, mais qui lui-aussi fut découvert le 29 juillet et mis en prison. Il employa son temps à réconforter les codétenus, et à pratiquer un ultime apostolat.
Il fut fusillé dans la nuit du 15 août 1936 avec 18 autres prisonniers.
Il est frappant de constater que ces Pères augustins avait auparavant consacré leur vie à un lointain apostolat aux Philippines et en Amérique du Sud. Revenus dans leur pays, ils furent assassinés par leurs propres compatriotes, eux qui avaient subi de si grands dangers à l' étranger...
Motril, la Calle Nuova en 1915
Le Père Vincent Soler naquit le 4 avril 1867 près de Saragosse et entra chez les Augustins récollets en 1882 sous le nom de Frère Vincent de Saint-Louis-de-Gonzague. Il partit en mission pour les Philippines en 1889, et il y fut ordonné en 1890. Il connut la persécution de 1898, et retourna en Espagne en 1906.
Il fut Supérieur de la Province andalouse, et en 1926 fut élu Prieur Général de l' Ordre, charge à laquelle il renonça peu de temps après. A Motril, il rénova l' Association de Sainte-Rita, fonda en 1914 le Cercle Catholique des Travailleurs et une école du soir. Il avait 69 ans à sa mort le 15 août 1936.
Le Père Deogracias Palacios naquit le 22 mai 1901 près de Burgos. Il entra à 15 ans au couvent d' Agreda sous le nom de Frère Deogratias de Saint-Augustin, puis fut envoyé en 1923 au Brésil où il devint prêtre en 1925. Il fut missionnaire au Brésil et en Argentine, et retourna en Espagne quelques mois à la fin de 1930, et à nouveau définitivement en 1933. Il fut Supérieur de la communauté de Monachil près de Grenade. En 1936 il était Supérieur de Motril. En accord avec ses Frères, il refusa de quitter la ville. Il avait 35 ans, lorsqu' il fut fusillé le 25 juillet 1936.
Le Père Léon Inchausti naquit le 27 juin 1859 dans la province de Biscaye. Ayant reçu la permission de son père - mort en odeur de sainteté - il entra chez les Augustins à 19 ans au couvent de Monteagudo, sous le nom de Frère Léon de ND du Rosaire. En 1884, il partit pour les Philippines, où il reçut l' ordination sacerdotale. Il y resta 14 ans, et revint en Espagne en 1898 après la révolution philippine. Il fut ensuite destiné aux missions du Brésil jusqu' en 1921. Il vécut alors au couvent de Grenade, puis en 1927 à Bilbao et enfin en 1928 à Motril. Lorsqu' il mourut fusillé le 25 juillet 1936, il avait 77 ans.
Le Père José Rada naquit près de Sarragosse le 17 novembre 1861. Il entra à seize ans au Couvent de Monteagudo en tant que novice, sous le nom de Frère Joseph de ND des Douleurs. Le 1er juin 1884, il fut envoyé en mission aux Philippines avec le Père Inchausti. Il fut ordonné prêtre à Cébu en novembre 1884. Pendant quatorze ans il fut curé-missionnaire sur l' île de Bohol. Il fut incarcéré pendant trois mois, lors de la révolution philippine.
En 1912 ( il avait 51 ans ) il fut envoyé par ses supérieurs au Brésil où il créa plusieurs paroisses. Il rentra dans son pays natal en 1925 et il reçut la charge de visiter la communauté augustine d' Andalousie. En 1936, il devint prédicateur et confesseur au Couvent de Motril. Il espérait y terminer sa vie qui fut si féconde sous d' autres cieux, mais il fut fusillé le 25 juillet 1936 à 75 ans.
Le Père Julian Benigno Moreno naquit le 16 mars 1871 près de La Rioja. Il entra à quatorze ans comme novice au Couvent de Monteagudo et reçut le nom de Frère Julien de Saint-Nicolas-de-Tolentino. Son oncle saint Ezéchiel Moreno* en était le supérieur. Il fut ordonné prêtre en mai 1894, et en septembre de la même année fut envoyé en mission aux Philippines. Il retourna lui-aussi en Espagne en 1898. Il partit en 1902 pour l' Amérique du Sud, où il se dédia à la prédication et à l' éducation de la jeunesse. Il vécut en Colombie, au Panama, au Vénézuéla et au Brésil. Religieux extrêmement cultivé, il publia des centaines d' articles et de nombreux ouvrages au Vénézuéla et en Espagne. Il revint en Espagne - au Couvent de Motril - en 1933. Lorsqu' il mourut fusillé il avait 65 ans.
Le Frère José Ricardo Diaz naquit dans la province de Léon le 16 février 1909. Orphelin, il devint novice à dix-sept ans chez les Augustins récollets. Il fit sa profession religieuse en 1926 à Villaviciosa près de Madrid sous le nom de Frère Joseph-Richard du Coeur de Jésus. Il prit congé de ses Frères par la suite, à cause d' une crise vocationnelle ; mais en 1932, il retourna au Couvent de Villaviciosa, où il put enfin prononcer ses voeux perpétuels en 1934 à l' âge de 26 ans. Il venait d' arriver à Motril lorsqu' il fut fusillé le 25 juillet 1936 à 27 ans, et était donc le plus jeune de ses confrères.
Le Père Vincent Pinilla naquit le 5 avril 1870 près de Saragosse. Il devint novice à quinze ans et prononça ses voeux des mains du supérieur du Couvent saint Ezéchiel Moreno en 1886 qui lui accorda le nom de Frère Vincent de Saint-Louis-de-Gonzague. Il partit lui-aussi pour les Philippines en 1892 et devint curé de paroisse à Manille, puis à Caplan. Il passa deux ans en prison après la révolution de 1898. En 1900, il retourna en Espagne, et en 1902 partit pour le Brésil. Il avait une grande dévotion envers la Sainte Vierge essentiellement consolatrice. C' est en janvier 1927 qu' il retourna en Espagne, sans savoir qu' il allait à l' ultime sacrifice. Il avait 66 ans, lorsqu' il fut fusillé un crucifix à la main.
Don Manuel Martin Sierra, était curé depuis 1930 de la paroisse du Divin Pasteur de Motril. Il avait été auparavant professeur. Il avait 43 ans lorsqu' il fut assassiné après s' être écrié : " Vive le Christ-Roi ! "